Les Fourberies de Scapin - Galère et commedia dell'arte

 

Mais que diable suis-je allé faire dans cette galère ? C’est parfois la phrase qui me passe par la tête lorsqu’arrive le temps de rédiger une nouvelle chronique de Doc Myrmix. Alors quoi de plus normal que de vous parler aujourd’hui de l’œuvre de Molière, et plus particulièrement des Fourberies de Scapin ! Pourquoi cette pièce et pas une autre comme l’Avare, Tartuffe ou encore le Bourgeois Gentilhomme ? Alors d’une part, parce qu’il s’agit de la dernière pièce que j’ai vu (en retransmission mais ça compte !) et ensuite parce que c’est une de mes préférées ! Comme d’habitude, je vous parlerai un peu de l’auteur, ensuite de l’œuvre, et enfin j’expliquerais pourquoi je considère que c’est un classique.


Je ne vais quand même pas vous faire l’affront de vous demander si vous connaissez Molière ? On a tous eu un contact avec ce grand auteur de théâtre et représentatif de la comédie. Que ce soit pendant notre scolarité ou lors de sorties culturelles mais pour ceux qui ne connaitrait pas l’artiste, voici un petit point.


Jean Baptiste Poquelin, dit Molière, est baptisé en 1622 et meurt en 1673. Il est issu d’une famille de marchands parisiens. A 21 ans, il forme la troupe de l’Illustre théâtre qui parcourt la France pendant treize ans. A leur retour à Paris, le comédien devient le favori de Louis XIV pour lequel il conçoit de nombreuses pièces en collaborant avec de nombreux autres artistes comme Jean-Baptiste Lully par exemple. La troupe bénéficiera entre autre d’une salle au sein du Palais Royal, demeure du frère de Louis XIV puis sera invitée à jouer dans de nombreuses demeures et également à la cour.

Malgré son statut de favori du roi, Molière se retrouve tout de même parfois au cœur de polémiques liées à ces œuvres. Celle de l’Ecole des femmes, la première, revient sur la condition des femmes mais aussi sur les idées préconçues sur le mariage. La moralité de Molière est remise en cause par plusieurs de ses contemporains. Une de pièces de Molière va jusqu’à être interdite : Le Tartuffe. Attaquant la religion et les faux dévôts, la pièce pose le problème de la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Après l’interdiction par Louis XIV, Molière s’attelle à la modifier pour la rendre plus conforme. Elle ne sera autorisée qu’un an et demi plus tard en 1669.

Molière est aussi connu pour avoir inventé un nouveau genre : la comédie ballet. Mélange de théâtre, de danse et de musique, ce nouveau genre réussit à convaincre les contemporains. Après des années de succès, Molière, malade, monte une nouvelle fois sur scène pour interpréter encore une fois le Malade imaginaire. La légende raconte que Molière aurait été pris d’une forte quinte de toux pendant la pièce et serait alors mort sur scène en pleine interprétation. C’est bien évidemment faux, mais il mourra des suites de sa maladie quelques heures plus tard. Aux yeux de la religion, Molière n’ayant pas renoncé à sa profession de comédien, il ne peut pas recevoir de sépulture. Mais après une rapide intervention du roi, Molière est enterré dans le cimetière de la chapelle Saint-Joseph. C’est plus d’un siècle plus tard en 1792, que les autorités révolutionnaires décident de transférer les restes présumés de Molière. Il est au Père Lachaise depuis 1817.


Créée en 1671, les Fourberies de Scapin est une pièce en trois actes, rédigé en prose qui est fortement inspirée par la commedia dell’arte. Bien que la pièce n’ait pas obtenu un succès public immédiat, elle est aujourd’hui une des plus connues de Molière. L’intrigue est en partie inspirée de la pièce du poète latin Terence. Le but premier de cette pièce est d’avoir des décors sommaires pour la monter rapidement et facilement. Molière interprétera dix huit fois le rôle de Scapin.

Branle-bas de combat dans les ruelles napolitaines ! Octave a, en secret, épousé Hyacinthe, la jeune femme qu'il aime, mais voilà que son père a décidé à son tour de le marier à une inconnue ; quant à Léandre, c'est Zerbinette qu'il aime, mais son père en a lui aussi décidé autrement. Alors, que vont bien pouvoir faire ces deux jeunes gens sans le sou contre la puissance et l'autorité de leurs barbons de pères ? Faire appel à Scapin, bien sûr, le valet bondissant et malicieux, joueur et beau parleur : rien de tel que l'un de ses nombreux tours pour retourner la situation !

Après la mort du dramaturge, la pièce est reprise par les anciens compagnons de scène de Molière et obtient enfin le succès. Aujourd’hui, elle fait partie des pièces les plus jouées du théâtre français.  Comédie par excellence. La pièce se moque des pères voulant contrôler les avenirs de leurs enfants mais aussi des vieux avares, thème que l’on retrouve dans l’Avare, une autre pièce de Molière. La pièce met aussi en avant la malice et la débrouillardise dont font preuve les deux valets. Adaptée et mise en scène de nombreuses fois, on peut distinguer l’excellente mise en scène de Denis Podalydès pour la Comédie Française.  


En quoi cette pièce est un classique ? D’une part car elle fait partie du répertoire d’un auteur connu et reconnu pour son œuvre. En effet, lorsque que l’on évoque Molière, les Fourberies de Scapin est citée assez rapidement. La pièce fait aussi partie des corpus scolaires depuis de nombreuses années et n’est pas près de disparaître. Pour moi, le fait qu’une œuvre reste aussi longtemps dans des programmes est un bon indicateur. D’autre part, c’est une pièce qui est encore adaptée aujourd’hui, j’en veux pour preuve la dernière mise en scène de la Comédie Française. Enfin, elle rentre aussi dans les classiques par ses répliques et surtout une en particulier : « Mais que diable allait-il faire dans cette galère ! ». Cette réplique est aujourd’hui très célèbre et est même entrée dans le langage courant grâce à l’expression « Quelle galère ! ».

Les Fourberies de Scapin est sans aucun doute l’une de mes pièces préférées. J’aime le côté comique mis en avant par les personnages des valets et le côté ridicule des pères. Ma scène favorite reste celle du sac et de Scapin frappant allégrement son maître. Elle me fait rire à chaque fois et est associé à de très bons souvenirs de théâtre. J’avais adoré la mise en scène de Podalydès que j’ai pu voir en retransmission dans les cinémas Pathé. Cela ne remplace pas le fait de la voir en vrai mais j’estime être chanceuse d’avoir pu assister à une représentation de la Comédie Française.

 


Si vous voulez en savoir plus sur la vie de Molière, je vous recommande chaudement le film d’Ariane Mnouchkine qui date de 1978. Le film retrace la jeunesse de Molière avec Philippe Caubère dans le rôle-titre. Il dure quatre heures donc il est nécessaire de prévoir un peu de temps mais ce film est un vrai chef d’œuvre qui vaut la peine d’être vu. 

Vous pouvez lui préférez un film plus romancé comme Molière de Laurent Tirard sorti en 2007. Ici, le réalisateur s’attache à une période de la vie de Molière dont on ne sait rien, à savoir avant la grande tournée de la troupe en France. Molière est engagé par Monsieur Jourdain pour l’aider à apprendre à jouer une pièce de sa composition à Célimène, femme dont il cherche à obtenir les faveurs. Le récit met ainsi en place la genèse de plusieurs pièces qui feront la renommée de Molière. C’est un très bon film qui malgré son parti pris de romancer la vie de Molière reste agréable à regarder et est très émouvant. Romain Duris, Fabrice Luchini et Edouard Baer font tous les trois un travail formidable.



 

 

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