La Tresse - Une même histoire à un cheveu près

 


Dans certaines cultures, le cheveu contient la force physique d’une personne. On se rappelle du mythe de Samson et Délilah. C’est une partie de cette thématique qui est traité dans le roman dont je vais parler aujourd’hui, une force physique mais aussi mentale. La première fois que j’ai entendu parler du livre La Tresse, c’est lors de sa sortie. Je l’ai vu exploser sur les réseaux sociaux, sur booktube, un peu partout. Et comme d’habitude, même si le roman m’intéresse, le fait de le voir encenser à ce point ne m’a pas du tout donné envie. Et puis, quelques années plus tard, me voilà à le chercher dans une bibliothèque municipale…


Trois femmes, trois vies, trois continents. Une même soif de liberté. Inde. Smita est une Intouchable. Elle rêve de voir sa fille échapper à sa condition misérable et entrer à l’école.

Sicile. Giulia travaille dans l’atelier de son père. Lorsqu’il est victime d’un accident, elle découvre que l’entreprise familiale est ruinée.

Canada. Sarah, avocate réputée, va être promue à la tête de son cabinet quand elle apprend qu’elle est gravement malade. Liées sans le savoir par ce qu’elles ont de plus intime et de plus singulier, Smita, Giulia et Sarah refusent le sort qui leur est destiné et décident de se battre.

La première chose que j’ai lu sur ce roman c’était : « le roman féministe de l’année ». Il faut savoir que j’ai un problème avec le fait de mettre l’étiquette féministe sur tout. Certes ce roman parle d’histoire de femmes mais est-il pour autant féministe ? Oui par certains points de vue, non sur d’autres. Le féminisme, selon la définition du dictionnaire, est un mouvement militant pour l’amélioration et l’extension du rôle et des droits des femmes dans la société. Ce roman en montre différents aspects mais je trouve que certaines histoires vont à l’encontre de cette définition.

On suit trois femmes différentes les unes des autres. Elles ne sont clairement pas au même niveau : l’intouchable, l’héritière d’une entreprise familiale et l’avocate de renom. Déjà il y un déséquilibre dans les personnages. Smita ne peut que trouver un moyen d’évoluer pour elle et sa famille, tandis que Sarah a déjà tout ce que la société considère comme étant emblématique de la réussite. Giulia est un peu entre les deux. J’ai d’ailleurs préférée son histoire. Au-delà de la question d’évolution du statut de la femme (non le mariage n’est pas nécessaire pour sauver une personne), c’est un personnage plus construit que les deux autres puisque déjà sereine et plutôt établie. C’est elle, d’une certaine manière, qui apporte la solution aux deux autres. Cependant, elle trouve l’idée grâce à un homme et non pas seule… elle est prête à se sacrifier maritalement pour sauver l’entreprise. Certes, c’est cohérent par rapport aux événements, mais j’ai trouvé ça un peu dommage.

Là où j’ai eu plus de mal, c’est sur les deux autres histoires. Celle de Smita ne peut que révolter le lecteur. La situation des Intouchables en Inde est catastrophique et inadmissible. Elle choisit de tout laisser derrière elle pour offrir un avenir à sa fille. Le geste est noble, elle cherche à échapper à sa propre condition. J’ai largement préféré la conclusion que le propos rapporté pendant toute son histoire. J’ai trouvé que c’était celle qui était le plus mis en avant, étant donné que c’est la situation la moins enviable en termes de féminisme et justement, l’autrice en fait parfois un peu trop.

Du côté de Sarah, j’ai apprécié le traitement d’un sujet souvent trop méconnu en entreprise : la mise au placard. Souvent, quand un des employés a des raisons personnelles de s’absenter pendant un long moment (grossesse par exemple), et bien le patron peut parfois retirer des projets, donner moins de responsabilités… C’est ce qui arrive à Sarah avec sa maladie. Le contexte de ce récit est parfaitement bien décrit : les loups aux dents longues, les requins… J’ai beaucoup aimé la hargne avec laquelle se bat le personnage.

Et puis ce final… Je l’avais deviné à peu près au milieu du roman, mais il est amené de manière tellement touchante et avec tellement de respect pour tous les personnages que je l’ai trouvé très émouvant. Finalement, j’ai eu l’impression que l’Intouchable passait devant l’avocate de renom. Ces femmes se redonnent une forme d’espoir sans même se connaître grâce à de simples cheveux. C’est une excellente chute, mise en œuvre consciencieusement.

J’ai apprécié ce roman malgré ses quelques faiblesses. Le féminisme est une toile de fond pour expliquer que les droits des femmes, même lorsqu’on les pense acquis, il faut constamment veiller pour ne pas les perdre. Chaque histoire à son importance et peut donner une leçon. Je serai donc curieuse de découvrir les autres romans de cette autrice.

Commentaires