A la fin de ma lecture,
la première phrase qui m’est venu à l’esprit pour résumer ce livre a été le
titre d’une œuvre de Cioran : De l’inconvénient d’être né.
Cet inconvénient
d’être né, il transparait dans tous les personnages. De Claude (élevé comme un
garçon par son père), à Enzo (« l’enfant raté ») et Paul-Marie
(malmené par son père et par la société).
« Dans cette barbarie défroquée à qui l'on
prêtait des traditions d'élégance, ces gens prétendument éduqués ratissaient la
forêt vauclusienne avec un pack de bières, un décapsuleur et un permis de tuer;
et sous les chênes blancs des hauteurs luberonnaises, chacun de ses francs-tireurs
redevenait primitif ».
Qui peut
dire ce qu’il s’est vraiment passé cette nuit où Paul-Marie, employé de mairie
bien sous tous rapports, a recueilli chez lui Enzo, jeune adulte atteint de
déficience intellectuelle ? Dans ce village reculé de Provence où les préjugés sont rois et où l’on
condamne toute forme de différence, la vérité importe peu. Et Paul-Marie est
contraint de se cacher dans le grenier de Claude, sa mère, pour échapper à la
vindicte populaire.
Ce roman de
Mickaël Brun-Arnaud paru aux éditions Robert Laffont est un roman qui évoque la noirceur de la société et celle de
l’âme humaine. Le roman m’a touché car d’un point de vue plus personnel, j’ai
connu (un petit peu) l’ambiance de ces villages où tout circule à une vitesse folle,
où tout le monde connait tout le monde (même quand toi tu ne connais personne).
J’ai beaucoup aimé la description du milieu de la chasse, car pour le coup oui
c’est vrai. Tout ce qui est dépeint dans ce passage du roman est exacte.
L’alternance
de point de vue des personnages et des époques donne un vrai rythme au récit. La
compréhension se fait petit à petit et finalement le plus important n’est pas
de savoir ce qu’il s’est vraiment passé cette fameuse nuit mais plutôt comment
les personnages y survivent et avancent. L’auteur dépeint la compassion, puis
la haine et le rejet dans ces communautés parfois trop recluses.
Pour moi, les
personnages ne tombent pas dans le cliché justement parce que ce sont des
comportements qui malheureusement existent encore. A mon sens il y a une forme
de justesse. Et peut-être aussi une forme de renoncement. L’espoir est
finalement, assez peu présent dans le roman. On nous montre surtout une
humanité pleine de rancœur, à la fois juge et bourreau : « Dans
les campagnes rouges, la faucille du paysan s’abattait avant la faux de la justice ».
J’ai particulièrement aimé les personnages d’Enzo et de Claude. Je les ai
trouvé touchants chacun à leur manière.
C’est un roman
qui nous fait encore plus détester les tréfonds de l’âme humaine et les
comportements en société mais qui nous questionne aussi sur notre propre
conscience. Et nous qu’aurions nous fait ? Comment aurions-nous réagi face
à l’emprise de la société et du on-dit ? On ne peut pas le savoir car au
fond de nous, se cache peut-être une âme encore plus noire…
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